Journal des procès n°337 (28 novembre 1997)

L’estampe que nous reproduisons en couverture nous montre des membres de la Ligue catholique, dans la seconde moitié du XVIème siècle, défilant dans les rues de Toulouse, avec flambeaux et fouets à la ceinture : tout un programme ! L’Inquisition, établie depuis longtemps en Espagne, venait d’être officiellement généralisée dans tous les pays catholiques par le pape Paul III, en vue de faire disparaître toute trace de protestantisme. L’Index instauré en 1557, vouait à la destruction les livres jugés nocifs et le successeur de Paul III, Pie V accrut le caractère coercitif de cette politique, non seulement par la publication de “bons livres”, le catéchisme, le bréviaire,le missel et l’œuvre sans cesse republiée de la “Somme de Saint Thomas d’Aquin” mais encore par les bûchers où I’on brûlait vif.

Parallèlement, des catholiques fondèrent spontanément la Ligue, dite aussi Sainte Union pour la défense de la foi, mais aussi, en France, pour détrôner Henri III au profit du duc de Guise, la politique faisant bon ménage avec la religion.

D’abord soutenue par beaucoup de bons bourgeois, sincèrement pieux, la Ligue et ses processions menaçantes ne tardèrent pourtant pas à les inquiéter. Nous possédons à ce propos des textes où nombre de ces catholiques sincères s’alarmaient de ces démonstrations de force en ne manquant point de relever qu’y participaient, avec une ferveur particulière, des gens qui étaient en réalité la lie de la société. Sous couvert de la foi, c’était bien simplement des brutes, des gens qui aimaient la violence pour la violence qui revêtaient robes et cagoules, en exhibant leurs fouets. La recette est ancienne et toujours actuelle. On peut penser par exemple aux horreurs dont I’Algérie est aujourd’hui la proie, ou au Ku Klux Klan, les démonstrations de force en cagoules étant toujours nécessairement redoutables, la foi, quelle qu’elle soit, ne devenant plus que prétexte à violence. Giordano Bruno, dont nous vous parlons en page 20, en sait quelque chose.

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°329 (13 juin 1997)

Cette enluminure du début de la Renaissance italienne, florentine en I’espèce, nous montre la Justice en gloire, tenant, on serait tenté de dire “exhibant”, un glaive et une balance. C’est encore ainsi qu’on la représente, quoique le plus souvent avec une balance à deux plateaux, appelant I’idée qu’on peut y mettre dans chacun le pour et le contre afin d’en faire la pesée et non, comme ici, une balance romaine, plus proche en somme, symboliquement, de la pesée des âmes après la mort dans différentes religions.

L’enluminure que nous avons jointe en dessous, qui est de la même époque, nous montre les effets de la Justice pénale, c’est-à-dire ce qu’on risque à enfreindre les lois ou les coutumes. Longtemps en effet, les peines ne furent réputées efficaces que si le peuple pouvait voir les châtiments, au nombre desquels I’humiliation publique. Comme de tout temps, on mettait aussi l’accent sur l’égalité dans ces représentations symboliques et que même un prêtre, par exemple, n’était pas à I’abri de la répression. C’était tout à fait inexact naturellement. D’une part I’Eglise revendiqua très tôt le droit exclusif de juger les siens, parfois sévèrement mais en secret, d’autre part il serait aisé de montrer combien certaines
classes sociales échappèrent à la répression.

Ce clerc tonsuré et cette jolie jeune femme étaient-ils censés avoir été pris en flagrant délit de fornication, comme tant de personnages de Boccace qui, au demeurant, pour son compte, n’en faisait point un crime mais, au contraire, si les sentiments des amants étaient sincères, et quelle que fût par ailleurs leur situation sociale ou d’état, avait plutôt tendance à murmurer “proficiat” !
Rien de nouveau sous le soleil à cet égard depuis le XIVème siècle, la morale de Boccace n’ayant pas une ride et s’opposant toujours à celle des cagots, des hypocrites et des justiciers par goût.

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°315 (29 novembre 1996)

Autrefois, les procureurs – c’est-à-dire ceux qui géraient des dossiers et représentaient des personnes en justice – avaient l’habitude d’épingler sur leur robe des documents relatifs aux affaires dont ils étaient chargés. Ils trouvaient sans doute ça pratique ; peut-être aussi voulaient-ils montrer qu’ils étaient très occupés, donc importants. Le superbe dessin colorié que nous reproduisons en couverture est évidemment une charge, une exagération cocasse de cette coutume. Dans un ordre plus modeste, nos avocats ornent souvent leurs épitoges de trombones, à défaut de pouvoir exhiber, comme leurs confrères français, des décorations. C’est mieux : ces petites agrafes indiqueraient en effet qu’on ne se prend guère au sérieux et qu’à tout le moins on est sensible à l’égalité, nul avocat n’étant censé être plus qu’un autre. Marie Denis, dont les billets sont toujours merveilleux dans la Revue Nouvelle, écrivait un jour, à propos des falbalas judiciaires, qu’elle ne voyait pas d’objection aux toges et aux simarres à la condition qu’il y en eût aussi à la disposition des justiciables, ce qui serait le signe d’une égalité réelle entre toutes les parties à un procès. C’était judicieux : rien n’est jamais plus gai que de piéger les vaniteux à leurs propres rets.

La querelle, feutrée, est ancienne pour ou contre les toilettes judiciaires et la Cour de cassation, à laquelle les événements donnent une publicité qui n’est sûrement pas pour lui plaire, a pu paraître un peu ridicule à cet êgard à des gens qui n’avaient jamais songé jusqu’ici à y pénétrer.

Sans doute conseillers et avocats généraux ont-ils le bon goût de se moquer Lln
brin d’eux-mêmes en s’appelant, quand ils revêtent le drap rouge et I’hermine, des “homards”, mais il ne faudrait pas pousser, ils y tiennent et l’argument le plus convaincant que nous ayons entendu à ce sujet dans la bouche d’un haut magistrat était : “Si vous me posez la question, je vous répondrai tout de suite qu’il faut supprimer ce faste d’antan. Mais je préférerais que vous ne me le demandiez pas…”
Oh ! le rusé !

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°307 (14 juin 1996)

Le calembour dont un des rois, Victor Hugo, disait que c’est la fiente de l’esprit qui vole, offre bien des avantages. Il ne coûte rien et supplée à la fatigante obligation de penser. On constate qu’il est devenu une névrose, une manie au sens psychiatrique du mot. Aucun titre n’en est exempt, c’est l’impératif de petit clin d’œil. Vingt dieux ! pour qui prend-t-on le lecteur d’oser lui faire un clin d’œil ?

Les meilleurs se soumettent : un très beau reportage sur les réactions en Oklahoma à un attentat meurtrier est intitulé Les raisons de la colère, fine allusion à l’opération israélienne au Liban, nommée Les raisins de la colère [NdlR. et au roman de Steinbeck]. Ça ne veut rien dire et tout dire, ça ne coûte rien et permet de suggérer un rapprochement éventuel. Le petit clin d’œil décharge ici d’avance du reproche d’esprit de sérieux (oh ! ces intellectuels !) en donnant à penser que ce reportage sera à la portée de tout le monde, même le dernier des imbéciles pouvant comprendre que “raisons” et “raisins” composent une joyeuse plaisanterie.

Ce syndrome qui nous envahit, comme les sempiternelles expressions toutes faites du genre “revoir sa copie”, ou “Sécu” pour Sécurité sociale qui ferait vieux jeu, peut être rapproché d’un nouvel us de politiques répondant au harcèlement médiatique en obligeant le journaliste qui les interroge à courir derrière eux et finalement à leur claquer la porte au nez. On voit ça tous les jours à la télévision, notamment avec M. Dehaene. Quelle grossièreté ! Mais qui faut-il tancer le plus ici et le journaliste ne se met-il pas en position d’humiliation de courir comme un petit chien, un peu comme on s’abaisse en sacrifiant au calembour ? Ce n’était pas y sacrifier, par contre, que de tirer sur deux pages dans le Morgen, à l’occasion de la mort de Sir Laurence Olivier : Not to be…

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°303 (19 avril 1996)

L’onomatomancie était une divination pratiquée à l’aide du nom d’une personne, I’idée étant que le nom d’une personne la destinerait plus ou moins. Balzac y croyait fort, mais est-il un seul romancier, un seul écrivain qui le néglige ? La question est double au demeurant : on peut affubler un personnage d’un nom qui évoque ses qualités ou ses défauts mais notre nom patronymique engagerait-il peu ou prou notre vie, nos réactions et nos desseins ? Alfred de Musset aurait-il pu écrire l’oeuvre d’Emile Zola, et réciproquement, Patrice de la Tour du Pin celle d’lsidore Ducasse ?

Quand Balzac appelle un de ses personnages les plus fameux Vautrin, on ne manque pas de se dire que c’était “bien trouvé”. Il y a dans ces deux syllabes qui éclatent comme des coups de pistolet quelque chose qui colle étonnement à ce forçat en rupture de ban, à cette force de la nature. Maeterlinck a poussé le plus loin peut-être cette sorte d’onomatopée de l’âme et du cœur avec La Princesse Maleine ou Pelléas et Mélisande, soit des noms dont on serait tenté de dire que toute l’œuvre découle.

Comment passer pour une brute quand on s’appelle de Musset ? On écrit fatalement La Nuit de Mai ou On ne badine pas avec l’Amour – même si nous savons aujourd’hui par les Mémoires d’une prostituée qu’il se conduisait comme une brute dans les bordels, chose qu’il se flattait sans doute de garder secrète à jamais. Ainsi, l’onomatomancie ne prononcerait que sur l’apparence des êtres et, à la limite, Vautrin aurait-il pu écrire des bluettes, tout aussi secrètement qu’Alfred rompait avec son nom en traitant de manière révoltante une femme dont peut-être il se souvenait aussi en parlant d’un “cou blanc, délicat, se penche et de la neige effacerait l’éclat…

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°299 (23 février 1996)

Il est probablement très significatif que d’aucuns n’ont rien de plus pressé que de vous dire, lorsque vous pensiez leur apprendre quelque chose : “Je sais !”. On croit pouvoir compléter leur information : grave erreur ! Cette tournure d’esprit peut prendre de singulières proportions. Si vous lâchez dans la conversation que vous avez eu I’occasion de rencontrer tel ou tel grand personnage de I’Etat, c’est avec un haussement d’épaules excédé qu’on vous répondra : “Je le connais !”, un peu comme si ce n’était pas la solution du problème. Quel problème ? Il doit y en avoir un que résoudrait la connaissance de tel fait ou telle personne, apparemment, le ton sur lequel on vous répond (il est définitif) montrant assez que ce n’est pas encore ça qui les aidera.

Ceux qui disent à tout bout de champ, comme dans la chanson de Gabin, “Je sais” ou qui soupirent qu’ils connaissent toutes les personnes dont on leur parle d’aventure ne sont manifestement pas contents de leur sort. Ils le trouve injuste et sont sans cesse à l’affût de ce qui pourrait enfin rétablir, dans leur chef, la destinée qu’ils estiment mériter.

Il ne manque heureusement pas non plus de gens qui ont gardé leurs facultés d’enthousiasme, on dirait volontiers d’excitation sociale et qui, au lieu de dire ‘Je sais” ou “Je le connais” s’exclament volontiers : “Ça alors !” ou “Raconte-moi !”. Même si, parfois, ils savaient déjà, ou connaissaient aussi bien que vous, car la gentillesse est leur fort.

On pourrait peut-être dire que les uns sont des bourgeois, au sens le plus péjoratif du terme, et les autres des aventuriers, au sens le plus joyeusement
adouci du mot !

A propos, saviez-vous que le prochain numéro du Journal des procès sera le trois-centième ?

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°280 (31 mars 1995)

Notre illustration de couverture nous montre un tribunal de commerce, au XVIème siècle. On voit, en haut, en robes rouges et bleues, les quatre échevins. Devant eux, les greffiers, le “clerc”, le procureur (l’air fâché comme il se devait sans doute et dont, Dieu sait pourquoi, la banderole est à I’envers), enfin le sacro-saint receveur des amendes, payées illico. En France, les échevins étaient élus, deux parmi les notables marchands et deux parmi les juristes. Ils connaissaient de litiges relatifs aux marchandises, réglaient les contestations entre fournisseurs, fixaient le prix des denrées, etc. Les appels étaient portés devant le parlement.

Ces échevins avaient la réputation parfaitement fondée d’être des coquins. Ils s’arrangeaient souvent pour postposer les élections, en particulier lorsqu’un candidat s’annonçait déplorablement honnête. Corrompus par vocation, ils avaient érigé la concussion, les “épices”, en institution et leurs abus étaient infinis, Ainsi inventaient-ils des procès en province ou à l’étranger pour s’octroyer des voyages tous frais payés. Le denier du pauvre tombait en majeure partie dans leurs escarcelles et il n’est pas de malversations qu’on n’ait pu leur reprocher.

Louis XIV en finit avec l’élection des échevins dont la charge, d’élective qu’elle était, devint vénale, ce qui fit rentrer de I’argent dans les caisses de I’Etat tout en rendant cette “justice”, de plus en plus scandaleuse.

On éditait pourtant de nombreux manuels, comme “Moyen d’éviter procès, faict pour I’utilité des marchands et autres négociateurs”, sortes de vade-mecum du commerçant pour qui la seule ressource en effet était, soit de payer les échevins, soit d’éviter le progrès. Si cette histoire vous amuse…

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°279 (17 mars 1995)

Le dessin (colorié par nous) reproduit en couverture est extrait du Songe de Poliphile, chef-d’oeuvre insurpassé des livres imprimés, Alde Manuce l’édita à Venise en 1499 et on reste stupéfait de la somme de talents conjugués que représente cet in-folio de 234 pages. Le texte en est mystérieux et fascinant. On suppute que son auteur serait un Dominicain, Columna, parce qu’en assemblant les premières lettres des trente-huit chapitres on obtient la phrase Poliam Frater Franciscus Columna permavit. L’ouvrage tout entier procède de tels acrostiches, de subtilités proprement cabalistiques. Il est écrit en un italien très savant, farci de néologismes que seuls des linguistes avertis peuvent entendre.

Le Songe de Poliphile est, semble-t-il, initiatique, didactique, symbolique et, assurément, ésotérique. Ce serait une véritable Bible de l’humanisme et de la conscience aiguë qu’avaient ces humanistes de la splendeur de la vie. Il nous entraîne dans un jardin dont l’architecture et les monuments évoquent, par exemple, ceux de Bomazo, à Viterbe où on ne peut manque d’être saisi, d’une angoisse exquise et morbide, tout y paraissant si lourd de sens, mais lequel ?

On soutient parfois que Le Songe de Poliphile fut un cri de désespoir d’humanistes épouvantés de constater que la papauté s’engageait dans la voie du pouvoir temporel, changement politique qui coïncida avec les morts mystérieuses de nombre d’intellectuels aussi brillants que Pic de la Mirandole ou Ange Politien. A l’appui de cette thèse, on doit bien mettre le formidable investissement de tous ordres que représenta cette publication par le prince des éditeurs de cette époque, Alde Manuce, et que, par exemple, les nombreuses et merveilleuses illustrations de l’ouvrage furent successivement et même concomitamment attribuées au Pérugin, à Raphaël, Bellini, Carpaccio, Mantegna, Montagna et bien d’autres encore, comme si tant de génies de la pensée et des arts s’étaient unis pour lancer un cri de désespoir dont les échos ne sont plus perceptibles aujourd’hui que dans les cyclamens sauvages qui ont poussé, couleur de cernes et de lilas, aurait dit Apollinaire, au creux des rocs sculptés de Bomazo…

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°272 (9 décembre 1994)

Le Cupidon, de Dùrer que nous publions en couverture de ce numéro tranche singulièrement avec les représentations habituelles du fils de Vénus, dieu des tendres attachements. Ce n’est pas d’une flèche qu’il blesse les cœurs mais d’un carreau, d’un trait dont la pointe n’est pas légère mais au contraire mortelle. Le style-même du dessin n’a rien d’érotique, il est plutôt terrible ! Cet enfant ailé a des allures de bête d’Apocalypse…

Nous le voyons dès lors moins comme le frère des Jeux, des Plaisirs et des Ris, ou des trois Grâces (car Vénus était prolifique) mais comme une de ces divinités proches d’Eris ou d’Adrastée, au teint livide, aux joues creuses et aux mains toujours ensanglantées.

La calomnie, monsieur ! Le mal est fait, il germe, il rampe, il chemine, et rinforzando de bouche en bouche il va le diable ; puis tout à coup, je ne sais comment, vous voyez calomnie se dresser, siffler, s’enfler, grandir à vue d’œil. Elle s’élance, étend son vo| tourbillonne, enveloppe, arrache, entraîne, éclate, et tonne ; et devient, grâce au ciel, un cri général, un crescendo public, un chorus universel de haine et de proscription. Qui diable y résisterait ?” (Beaumarchais, Figaro)

Dùrer fit plusieurs dessins sur bois pour illustrer I’Apocalypse et rien n’est plus impressionnant que la disposition de formes qu’il composait dans un espace réduit, avec une force d’expression proprement renversante. Son Cupidon, est sans doute, à cet égard, tout autre chose qu’un petit dieu farceur !

Philippe Toussaint


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Journal des procès n°271 (25 novembre 1994)

Jacques Callot, un peu écrasé entre Durer et Rembrandt, était pourtant lui aussi un très grand. La pièce, lavis et bistre, que nous reproduisons en couverture en atteste parmi bien d’autres chef-d’oeuvres. Jacques Callot en effet, qui mourut à 42 ans n’a pas laissé moins de mille six cents planches, dont celles des Misères et malheurs de la guerre qui sont un des réquisitoires les plus virulents qu’on ait jamais fait à cet égard.

L’homme suscitait et suscite toujours la sympathie. Fils de famille relativement illustre, il se sauva de chez ses parents à l’âge de 12 ans pour aller en Italie, via la Suisse, et fut adopté en cours de route par des bohémiens avec qui il fit grande amitié. Ramené manu militari en Lorraine par des connaissances de ses parents qui l’avaient découvert à Rome, il s’échappa à nouveau, il avait alors 14 ans, fasciné, comme Stendhal, par I’Italie dont son frère aîné le ramena à grands coups de pied dans le derrière. Son troisième voyage en Italie fut plus conventionnel. Il faisait partie d’une ambassade du duché de Lorraine et quand, quelques années plus tard, il revint en France, ce fut glorieux, riche et recherché par des personnages aussi considérables que le duc de Florence et Louis XIII. Raphaël l’admirait, il lui demanda d’échanger leurs portraits, ainsi que Van Dijk, qui lui proposa de le peindre pendant qu’il le portraiturait lui-même.

Quant à savoir le pourquoi des escargots, nous en ignorons tout ! Mais Callot adorait la fantaisie, son oeuvre abonde en “grotesques” qui ne vont jamais sans tendresse. Toutes les estampes de Jacques Callot nous montrent qu’il aimait les gens, et notamment les filles, dont certaine bohémienne : c’est bien assez pour lui faire les honneurs de notre couverture !

Philippe Toussaint


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